« Depuis toujours je suis très à l'aise en expression orale ». On le croit sans réserve, celui qui a su improviser pendant près d'un quart d'heure sur un thème aussi trivial que la taille des pommiers. Philippe Morvan pratique le théâtre en amateur depuis vingt ans, éprouvant les bonheurs et les doutes de la scène : « C'est impressionnant d'être sur scène, dans le noir, devant un public ». Ses impressions de comédien sont indissociables de son désir de les partager. Après ces quelques mots, il enchaîne rapidement sur la nécessité de développer les activités artistiques des associations basées à Lampaul. Animer, c'est avant tout laisser la parole aux autres et « permettre aux gens de s'exprimer ».

Un tableau vivant

Sa rencontre avec les arts de la rue est sans surprise liée à son travail. Il s'agissait de trouver un angle original et peu coûteux pour la programmation des Tombées de la Nuit à l'Enclos. Les habitants se sont montrés surpris d'un tel choix : des jongleurs? des cracheurs de feu ? Les a priori étaient prégnants... Philippe Morvan, qui connaissait très peu les arts de la rue, a alors parcouru le Pays de Morlaix pour assister à des spectacles du Mai et du FAR et être ainsi plus convaincant dans la défense de son projet. Quelle belle entrée en matière : « La Bête » d'Annibal et ses Eléphants, un spectacle qui joue sur les codes même des arts de la rue ! Parmi ses souvenirs les plus marquants, il cite « Les Maudits Sonnants » de Transe Express et la déambulation « Théâtre d'1 rue » de Generik Vapeur. « On a vu des choses extraordinaires », « des trucs de fada », qui pour sûr ne laissent personne indifférent. Il apprécie également des ambiances plus intimistes comme « Les Balles populaires » de Gorky. A l'issue du spectacle, le public s'interroge : Gorky est-il vraiment russe ou reproduit il cet accent ? Joue-t-il le même personnage au fil de ses créations ? Cette instauration du doute plaît beaucoup à Philippe Morvan. « Après un spectacle, on continue d'y penser, à la différence du film ou du concert. » Finalement, les arts de la rue sont pour lui un véritable lieu d'expérimentation, évoluant sans cesse selon le site, la météo... Il les compare à un tableau : « jamais moche et jamais fini ».

Passeur de passion

Philippe Morvan prolonge son expérience de spectateur en réinvestissant certaines techniques des arts de la rue dans son travail d'animateur. Ceux-ci apportent en effet des clés originales pour « faire passer un message » - notamment auprès des enfants. Son objectif est de transmettre cette passion et de convoquer de nouveaux publics. Il décrit à ce propos la venue de la compagnie KompleXKapharnaüm comme « une expérience inoubliable ». Le principe du spectacle « SquarENet » est le suivant : les artistes investissent un lieu pendant plusieurs semaines, récoltant témoignages et images des habitants. Ils choisissent ensuite un « arbre à palabre » pour présenter ces documents. A Lampaul, c'est le lavoir qui a été mis en spectacle. Philippe Morvan exprime son bonheur d'avoir vécu la création de l'intérieur : « voir ces hurluberlus débarquer dans nos bureaux », redessiner des endroits familiers, faire le lien avec la population locale... Il se souvient d'une rencontre magique avec l'un des artistes, un matin très tôt : « l'un tombé du lit et l'autre qui n'avait pas envie de dormir ». Au lecteur de deviner qui est qui.

« L'une des plus belles communes du Finistère »

Le lavoir de Lampaul-Guimilliau

Note : Si cet article vous a donné envie d'en savoir plus sur le village de Lampaul-Guimiliau, vous pouvez visiter le site www.lampaul-guimiliau.com. Les soirées de juillet sont très animées, avec chaque semaine des spectacles de rue et des concerts.

Texte : Camille Poiraud / Photo : lefourneau.com

Plus de liens : Les Coucher de Soleil à l'Enclos / SquarENet